Notes de lecture : Civilisation et Divagations

Civilisation et Divagations
de Louis-Vincent Thomas
Payot – 285 p.,

louisvincentthomas.jpg

Article paru dans Les Nouvelles Littéraires N° 2689 du 31 mai au 7 juin 1979

Louis-Vincent Thomas nous propose dans ce remarquable essai, une sorte de voyage à travers notre propre imaginaire, celui de notre inconscient, de nos livres, de nos films, de nos villes. Plus qu’une réflexion sur les objets hétéroclites qui constituent la mythologie moderne, il s’agit d’une exploration au scalpel de tout ce qui nous hante. Les vieux démons retrouvent, parfois, une étrange jeunesse. King Kong et Nosferatu n’en finissent pas de revivre. Des insectes géants aux anges exterminateurs de la science-fiction, des films-catastrophes, des multiples réincarnations de Satan aux angoisses qui se lisent sur le visage de chacun, une longue chaîne de peurs, de fantasmes de mort et de destruction nous enserre.

L’auteur fait surgir quelques fragments de cet imaginaire moderne et il les analyse, cherchant à déceler derrière ces mythes et ces rêves, ce qu’ils révèlent de plus secret, de plus lourd de sens. La tragédie grecque fut l’expérience de nos situations limites. Les danses macabres du Moyen Âge et la peinture religieuse, les prédicateurs fanatiques du Charnier des Innocents, ont trouvé leurs historiens. Qui dira aujourd’hui la somme d’angoisses, de  fantasmes, d’agressions sournoises et rentrées de l’homme de la rue ? De même que la science-fiction américaine des années 50 reflétait assez fidèlement les vicissitudes de la guerre froide, les fresques apocalyptiques hollywoodiennes ou les illustrés des kiosques révèlent notre peur de l’autre, du danger, de l’inconnu. Images infantiles et mortifères qui s’inscrivent dans un unique décor : celui de la ville moderne, de la grande ville où chacun naît, survit et meurt.

C’est sans doute ce lien entre la ville, l’imaginaire et la mort que Louis-Vincent Thomas analyse avec le plus de profondeur. Dans ce petit livre modeste, s’affirme une réflexion fondamentale.

Jean-Michel PALMIER.

Laisser un commentaire