Notes de lecture: Libre N° 3.

Libre N° 3
Petite Bibliothèque Payot. 246 p.,

pierreclastres.jpg Pierre Clastres

Article paru dans Les Nouvelles Littéraires N° 2645 du 20 au 26 juillet 1978.

Fidèle à son projet de rencontre et de confrontation entre la politique, l’anthropologie et la philosophie, ce nouveau volume de Librenous propose une série de réflexions sur des thèmes très divers, qu’il s’agisse du curieux essai de K. Pomian sur la « Théorie générale de la collection » qui tente une sorte d’archéologie de la collection, du butin, du musée en Occident, des analyses des rites de la mort chez les Yanomani et du mythe de l’Homme-Femme chez les indiens d’Amérique du Nord, de l’analyse de la naissance de l’imaginaire que propose C. Castoriadis à partir d’Aristote, de l’interprétation des écrits de Tocqueville par C. Lefort.

On ne saurait nier pourtant que ces rencontres souvent inattendues soient toujours riches d’aperçus nouveaux et de questions. Libre, assurément correspond à une nécessité par sa volonté d’explorer les articulations fondamentales des problématiques en sciences humaines, leurs frontières, de jeter des ponts entre des disciplines séparées, d’interroger des oeuvres classiques à la lumière du présent, de les réévaluer, de les comprendre avec un regard neuf. C’est cette absence de dogmatisme, cette ouverture conceptuelle qui ont permis la publications d’essais aussi originaux que ceux de l’ethnologue, trop précocement disparu, Pierre Clastres, sur le pouvoir, la guerre dans les sociétés primitives. Dans l’horizon anthropologique, on lira avec beaucoup d’intérêt le texte de Pierrette Désy sur les transvestis chez les Berdaches qui constitue un apport intéressant à la connaissance de l’homosexuelité chez les indiens. L’essai de Pierre Clastres, inachevé à sa mort, sur l’ »anthropologie des marxistes » est par contre assez décevant. Règlement de comptes sommaire autant avec le marxisme qu’avec les anthropologues marxistes, cet essai – texte d’humeur plus qu’analyse théorique – use plus volontiers de l’insulte et de la plaisanterie facile que de la réfutation. Qu’il désapprouve les travaux de M. Godelier, soit. Qu’il se borne à l’insulter est autre chose. Etait-il vraiment nécessaire d’ajouter un texte aussi « inachevé » dans la forme que dans le fond ? Il n’ajoute assurément rien à l’oeuvre de l’ethnologue qui est pourtant souvent passionnante.

Jean-Michel PALMIER.

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