Marxisme et psychologie

bcea1marxismeetthoriedelapersonnalit.jpgMARXISME ET THÉORIE DE LA PERSONNALITÉ, de Lucien Sève. Postface à la troisième édition. Éditions sociales, 72p.; 10F.

Peu d’ouvrages récents ont suscité autant de discussions théoriques en France, et surtout en Allemagne et dans les pays socialistes, que Marxisme et théorie de la personnalité, paru en 1968. La clarté de l’exposé, l’ ampleur des vues, l’analyse rigoureuse à laquelle se livrait l’auteur, à partir des textes fondamentaux du marxisme sur les relations qui existent entre l’individu et les rapports sociaux, montraient qu’aucune science de l’homme ne pouvait méconnaître l’importance du matérialisme historique. Depuis les premières ébauches de G. Politzer, aucune contribution aussi importante n’avait été apportée à la confrontation du marxisme et de la psychologie.

Un « antihumanisme »?

La publication, en volume séparé, de la postface à la troisième édition montre l’intérêt de toutes les discussions et mises au point que ce livre a suscitées. Lucien Sève ne se contentait pas , en effet, de critiquer les théories de Janet, de Lewin ou de Freud. Il prenait position sur l’ensemble des questions soulevées par l’anthropologie, envisagée du point de vue marxiste. Après une importante discussion avec Adam Schaff, philosophe marxiste polonais, qui, au nom de l’ »humanisme philosophique » voulait substituer à la thèse fondatrice du « matérialisme historique »  : «  l’essence humaine est l’ensemble des rapports sociaux« , une définition feuerbachienne, Lucien Sève répond aujourd’hui à l’ »antihumanisme théorique » et plus précisément à l’amalgame qu’effectue Louis Althusser dans sa Réponse à John Lewis entre l’ »humanisme scientifique » qu’il défend et l’ »humanisme idéaliste » que représente Roger Garaudy ou encore Sartre. A partir de l’autocritique  de L. Althusser, de sa reconnaissance du rôle que jouent des catégories philosophiques  comme celle d’aliénation et de négation de la négation dans le « marxisme mûr« , Lucien Sève montre les perspectives qu’elles ouvrent, en particulier la remise en cause radicale de la réduction du marxisme à un «  antihumanisme théorique« . Non seulement la critique que Lucien Sève fait des positions d’Althusser dans le domaine philosophique  est l’une des plus claires et des plus pertinentes, mais on trouve aussi abordés, à propos d’objections formulées par des marxistes d’Allemagne démocratique où d’autres pays, les problèmes fondamentaux que pose toute articulation du marxisme et de la psychologie. Par delà un livre et un auteur, c’est un secteur important de la recherche en sciences humaines qui est ainsi exploré.

JEAN-MICHEL PALMIER

 

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