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HABERMAS : un continuateur de l’Ecole de Francfort ?

Article paru dans Le Monde en 1974

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Jürgen HABERMAS

* PROFILS PHILOSOPHIQUES ET POLITIQUES, de Jürgen Habermas.
Traduit de l’allemand par F. Dastur, J-R Ladmiral et M-B de Launay.
Gallimard, 292 p.; 41 F.

UNE thèse aujourd’hui assez répandue présente en Jürgen Habermas l’ héritier et le continuateur de l’ École de Francfort. Une telle affirmation repose sur le fait qu’il a été l’ élève, puis le collègue de Théodor Adorno, non sur une étude précise de son oeuvre. Sur le plan théorique, cette affirmation est déjà loin d’être évidente. Sur le plan politique, elle est erronée. Dès 1968, en effet, des divergences profondes, apparues entre Habermas, Adorno et Horkheimer, ne permettaient plus de le considérer comme  le continuateur d’un mouvement vis à vis duquel il prenait officiellement se distances. Ses démêlés avec la contestation étudiante pour laquelle il créa cette expression tristement célèbre de « fascisme de gauche » montre qu’il ne saurait en aucun cas être identifié à des penseurs qui ont formé les armes théoriques de cette contestation.

     La Technique et la science comme idéologie, récemment parue en français, était loin de prouver l’originalité de Habermas. Profils philosophiques et politiqueséveille encore plus de méfiance. Le recueil d’articles de circonstances, parus dans les journaux allemands, est aussi pauvre que la conception qu’il propose du rapport de la philosophie à la politique. Les études qu’il consacre à Heidegger sont superficielles et n’atteignent pas la méchanceté incisive du Jargon de l’authenticitéd’Adorno. L’introduction au volume d’anti-hommages offert à Marcuse pour son soixante  dixième anniversaire n’est guère meilleure et les essais consacrés à Ernst Bloch et Théodor Adorno ne mettent guère en relief la prodigieuse richesse de leurs oeuvres.

     On peut donc s’interroger sur l’ intérêt de la traduction (d’ailleurs excellente) d’un tel volume.

JEAN-MICHEL PALMIER.

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